La légende rappelée plus haut devait être vivante dans la Manche, car il y avait à l’origine 4 lieux qui portaient le nom de Dur Ecu. Les archives attestent dès 1247 la présence d’une famille Durescu ou Durécu. La société féodale était organisée en suzerains et vassaux et en fiefs et sous fiefs. Aussi cette famille détenait notamment le quart de fief de Durécu à Gatteville (10km à l’est de Cherbourg) qui comptait parmi ses sous-fiefs le huitième de fief de Dur-Ecu à Urville-Hague (maintenant Urville-Nacqueville).
L’ensemble, qui était placé en bordure du chemin royal reliant Cherbourg à la Hague, est revenu au domaine du roi en 1307 sous Philippe le Bel, qui le donna à un serviteur de la couronne (nous dirions aujourd’hui haut fonctionnaire) contre une rente de 60 livres tournois, payable à la Saint Michel. Celui-ci le revendit à un bourgeois anobli de Carentan, mais actif à Cherbourg. Depuis, les Dur-Ecu de Gatteville et d’Urville changèrent souvent de main, mais ont toujours appartenu à des familles ayant des attaches locales. On peut facilement s’imaginer le style de vie des seigneurs de Dur-Ecu en lisant le journal de Gilles de Gouberville, qui en mentionne d’ailleurs en 1509 le nom du propriétaire. Aux environs de 1600, le Dur-Ecu à Urville fut vendu par les Heuzey à Thomas Lesdos, une famille en vue. Un des Lesdos vendit d’ailleurs en 1689 une maison au Hameau de Gruchy à Charles et Philippe Millet, père et fils, ancêtres de Jean François Millet. La maison natale du célèbre peintre a t’elle donc eu un propriétaire commun avec le manoir de Dur-Ecu ?